L’écho d’une empreinte

Camille Lescarbeau

Exposition - Galerie & bureaux

3 mai 2024 - 2 juin 2024
L’écho d’une empreinte est une installation qui explore les potentiels utilitaires et esthétiques des déchets dans une pratique de la sculpture en papier fait à la main.
Même jetés, les résidus de consommation ne disparaissent pas. Ils continuent d’évoluer et d’émettre des gaz polluants. Souhaitant donner une nouvelle forme à mes déchets synthétiques impossibles à transformer en papier, j’en fais des empreintes à l’aide de papier fait main. Pour ce faire, je puise dans ma collection de déchets de plastiques croissante et y extrais des formes telles que des boîtes de cartons, des paquets de gommes, de chocolats fins et des emballages de batteries. Ces sculptures-empreintes de déchets seront disposés sur les murs et le sol de l’espace d’exposition dans une installation foisonnante. 
En plus de rappeler ce monde de déchets dans lequel nous vivons, mes empreintes donnent à voir l’opération qui les a menées à être – ce geste, cette pression, ce soin. Dans mes empreintes, le passé (le paquet de gommes) et le futur (la sculpture de papier) se rencontrent. Les temporalités de ces objets font aussi contraste : d’un côté, la temporalité lente, voire, infinie du plastique et de l’autre, la temporalité rapide et fragile du papier. Avec cette installation, j’espère arriver à rendre partiellement visibles ces déchets dont j’ai tenté de prendre soin , afin d’inspirer l’espoir et d’appeler à l’action quant au potentiel de la matière à l’ère de la crise écologique.

Camille Lescarbeau, 2024.

 

Médiation culturelle :

Atelier créatif : Cliquez ICI

Regart vous propose un atelier inspiré des œuvres de Camille Lescarbeau et de son exposition L’écho d’une empreinte en galerie principale. Petits et grands auront l’occasion d’explorer le médium du papier dans la création de petites méduses colorées!
GRATUIT ! Contribution volontaire
3 ans et + | aucun réservation requise
13h à 16h
Des visites scolaires avec atelier sont offertes en lien avec cette exposition. Cliquez ICI pour plus de détails.

Camille Lescarbeau

Artiste

Démarche artistique:

Influencée par mon parcours en danse, je développe ma pratique artistique autour de processus laborieux et physiques. Rejetant la hiérarchisation entre art et artisanat, j’habite fièrement une posture d’artiste-artisane écoféministe. Pour moi, œuvrer en textile me permet de faire partie de l’histoire du monde et de connecter avec mes ancêtres. En ce sens, je m’inscris dans une lignée historique d’artistes et d’artisanes ayant travaillé la fibre. J’alterne entre le rapiècement de chaussettes, l’installation, le tissage, la broderie et une pratique du papier fait à la main au croisement de la peinture et de la sculpture.

Guidée par mes valeurs écoféministes, je travaille uniquement à partir de matières et d’objets récupérés. Ces dernières années, ceci m’a amenée à faire du papier fait à la main en déviant des objectifs de régularité et de maîtrise technique généralement associés à l’artisanat. Plutôt que des fibres nobles et des outils dispendieux, j’utilise des déchets et des objets issus de ma vie quotidienne. J’emploie des cartons d’œufs, du courrier et de vieilles esquisses, auxquels je n’ajoute aucun pigment : les couleurs de mes œuvres viennent des matières récupérées. Telle une peintre mélangeant ses pigments avant de s’affairer sur sa toile, je transforme mes déchets en pulpes aux différentes couleurs et textures. Je superpose les couches de pâtes à papier pour les unir en de grandes feuilles. Parfois, j’en fais plutôt des empreintes et des sculptures. Fragiles et précieux, les objets en papier qui découlent de ces expérimentations ne remplissent plus leur fonction utilitaire habituelle. Jamais mes papiers n’accueilleront ni mot ni dessin. Plutôt, ceux-ci demeureront témoins d’un processus de transformation lent, méditatif et empreint de soin.

En travaillant avec des déchets, je m’immisce dans la longue histoire de pratiques usant d’objets trouvés pour critiquer les ravages du capitalisme. Depuis les années 1960, beaucoup d’artistes répondent à ce tsunami de détritus qui envahit nos existences, en créant d’inquiétants assemblages de déchets. Personnellement, je ne cherche pas à alarmer ou à conscientiser le public face aux changements climatiques. Dans ma pratique, je critique cette société de consommation, tout en faisant une tentative de réparation. En ce sens, ma démarche s’inscrit dans le champ de pensées écoféministe associant la culture de domination des hommes sur les femmes à cette culture de domination, d’extraction et de destruction des ressources naturelles.

Par mon travail, je tente d’éradiquer cette culture de domination et de hiérarchisation que j’ai intégrée en grandissant dans un système patriarcal. Plutôt que d’imposer mon pouvoir sur la matière, je cherche à faire « avec » elle. Je m’éloigne de ce pouvoir « sur » pour passer à un pouvoir intérieur, un pouvoir de pouvoir. Face aux sentiments de colère, de tristesse et de terreur qui mènent à l’abandon, les écoféministes appellent à agir, ici et maintenant. Dans cette pensée, toute la terre est sacrée, qu’elle soit préservée ou polluée, détruite ou cultivée. Il nous revient d’entrer avec elle dans un rapport de soin et de guérison. Mes déchets, mes papiers, mes rebuts et mes empreintes sont tous de petits bouts de terre qui ont été maniés et remaniés. Ils sont sacrés. Ils méritent notre attention, nos soins. Tel est l’ouvrage auquel je m’affaire.

 

Biographie:

Camille Lescarbeau est une artiste-artisane écoféministe basée à Montréal. Elle s’intéresse à la lenteur, à la matérialité, au soin et à l’environnement. Sa pratique du papier fait à la main, développée à partir de ses déchets, la mène au croisement de la sculpture et de la peinture. Les installations textiles et sculpturales qui en résultent explorent les potentiels utilitaire, esthétique et poétique des matières désuètes.

Elle détient une maîtrise en arts visuels et médiatiques de l’Université du Québec à Montréal et un baccalauréat en histoire de l’art et arts visuels de l’Université Concordia. Elle a participé à plusieurs résidences à Zocalo (Longueuil, 2023), à Créer des ponts (Montréal, 2021) et à l’Atelier Retailles (2019). Ses expositions récentes comptent La matière se souviendra à la Galerie POPOP (2023), Lentement le temps à la Galerie Perchée (2020), Empêcher les feuilles de tomber et les fleurs de faner à la Galerie AVE (2019) et En matière d’espace à la Galerie FOFA (2018). Depuis 2023, son travail fait partie de la Collection Art Volt de l’Université Concordia.

Camille Lescarbeau présente régulièrement le fruit de ses recherches en contribuant à des tables rondes, à des ateliers et à des présentations, notamment au Centre Culturel George-Vanier, à Art Souterrain et à l’Atelier Retailles. Elle a co-fondé l’atelier de papier fait à la main de l’UQAM. Récemment, elle a reçu la bourse d’excellence en arts visuels et médiatiques de la Fondation de l’UQAM (2021).